
Le paysage politique malien traverse une zone de fortes turbulences. Ce 15 avril 2025, plus d’une centaine de partis politiques ont tourné le dos aux consultations organisées par les autorités de transition sur la révision de la charte des partis, dévoilant au grand jour une profonde crise de confiance entre le gouvernement et une large frange de la classe politique.
Un climat de défiance généralisée
L’initiative gouvernementale visant à relire la loi n° 05-047, régissant les partis politiques, a été accueillie avec scepticisme. De nombreux responsables politiques dénoncent une opération purement formelle, dépourvue d’un réel esprit de dialogue. Le symbole de la discorde : l’octroi de seulement deux sièges à représenter plus de 300 formations, perçu comme une tentative d’instrumentalisation du processus. L’indignation a été immédiate, débouchant sur un boycott concerté et retentissant, qui envoie un message clair quant au rejet des conditions imposées.
Dialogue rompu, confiance brisée
Ce refus de participer n’est pas né d’un caprice, mais d’un dialogue interrompu avant même d’avoir commencé. Les partis, soucieux d’un échange véritable, avaient sollicité une audience auprès du Premier ministre pour reporter les consultations. Face au silence ou au refus de cette demande, leur retrait a été inévitable. Ils y voient une atteinte directe aux principes démocratiques, et une mise à l’écart délibérée de leurs préoccupations.
Une légitimité contestée
Au cœur de la polémique se trouve la question de la légitimité même de ces nouvelles assises. Les partis rappellent que leurs positions ont déjà été exprimées lors des Assises nationales de la Refondation, supposées tracer les grandes lignes de l’avenir politique du Mali. Pourquoi relancer des discussions si les conclusions sont déjà écrites d’avance ? Ce doute sur la sincérité du processus alimente la frustration et la radicalisation des positions.
Vers une dérive autoritaire ?
Les craintes s’intensifient quant à une possible restriction des libertés politiques. Des rumeurs persistantes évoquent une volonté de suspendre ou dissoudre certaines formations politiques, à l’instar de ce qui s’est produit au Niger ou au Burkina Faso. Cette hypothèse suscite une vive inquiétude : plusieurs acteurs politiques redoutent une dérive liberticide, incompatible avec les aspirations démocratiques portées par la Constitution malienne de 2023.
Un rempart constitutionnel à défendre
La Constitution de 2023, pourtant toujours en vigueur, consacre le droit des partis à exister, à s’exprimer et à participer activement à la vie politique nationale. Pour les responsables politiques, toute tentative de réduire ces droits serait une violation inacceptable de l’ordre constitutionnel, un précédent dangereux pour l’équilibre démocratique du pays.
Un tournant décisif pour la démocratie malienne
Ce boycott massif ne saurait être perçu comme un simple contretemps. Il constitue un acte politique fort, révélateur d’une fracture profonde entre le pouvoir de transition et les forces politiques organisées. À travers ce refus de participer, les partis entendent défendre non seulement leur légitimité, mais aussi les fondements mêmes du pluralisme et de la démocratie au Mali. Le gouvernement est désormais face à un choix crucial : persévérer dans une voie perçue comme autoritaire, ou rouvrir un dialogue sincère et inclusif, condition sine qua non pour rétablir la confiance et apaiser les tensions.